dimanche, juin 26, 2011

Longtemps j'ai pensé qu'un marin naviguerait jusqu'à mes pieds enlisés longtemps j'ai cru qu'un homme au regard maritime s'emparerait de moi pour l'éternité et m'arracherait à tout ce qui m'encombre tout ce qui est là qui m'envahit. Je me demande encore si j'y ai vraiment cru, si vraiment un jour j'ai pensé nous irons voir la mer, un homme libre et moi. Les marins ont un bateau, les marins ne sont pas plus libres que les autres mais dites-moi au fond qui sont tous ces gens, qui sont tous ces prisonniers qui ne m'emmèneront jamais nulle part. Je ne veux plus croire et je suis là, allongée immobile et priant pour que plus rien n'essaie de me berner, de me faire croire que je survivrai, plus rien ni personne, plus jamais.

mercredi, juin 15, 2011

mais je vis faute de mieux

mais on est toujours là comme des cons, toujours bien statiques à attendre que quelqu'un vienne nous sauver la vie je me demande en quoi tu crois disent les murmures intérieurs on est ici immobiles et sans fléchir on pense quelqu'un viendra me sauver la vie mais personne ne sera assez naïf pour essayer de guérir un naufrage as-tu déjà vu des naufragés enfoncer dignement leurs ongles dans le sable parce que quelqu'un avait pris la peine de les serrer dans ses bras, sans rire, as-tu déjà vu quoi que ce soit d'aussi absurde on est là comme des cons, on est là bien statiques dans le genre je refuse de croire que je ne suis rien d'autre que minable mais on ne bouge pas on est toujours là bien statiques à réaliser qu'ils ont tout oublié, qu'on n'a jamais oh non jamais existé et quelqu'un va venir nous sauver la vie dit une voix anonyme mais non personne ne viendra nous allons mourir tu sais dit la voix lointaine et si sûre, nous allons mourir et je ne veux rien d'autre, on est toujours là parce qu'on ne peut pas bouger je ne veux pas bouger nous sommes statiques nous sommes seuls et abandonnés comme dans tous les cauchemars du monde et je ne veux pas croire que je n'ai pas vraiment existé pourtant dit la voix intérieure personne ne se souvient, on est là bien statiques et je ne vois que tes mains que tes lèvres autant fermer les yeux sur ce qui n'a soi-disant pas existé, on n'a jamais été aussi statiques aussi ridicules on ne peut plus rien déclarer si ce n'est s'il te plaît viens me sauver la vie personne ne viendra tu sais personne n'est plus statique que ton espoir englouti dit la voix presque morte.

lundi, juin 06, 2011

401

Les hommes qui ont enlevé leur veste à l'arrêt de bus et qui la gardent là, pliée sur leurs genoux comme un trésor, les deux mains posées à plat le long du col, ces hommes-là ont le côté maladroit de ceux à qui l'on a dit lorsqu'ils étaient enfants garde ton manteau tu vas prendre froid et qui timidement s'émancipent en secret de ce qui les a construits. Les hommes restent assis avec ce regard qu'ils imaginent déterminé et qui s'avère tellement enfantin, les mains posées sur le col de leur veste certainement trop grande pour eux, les ongles courts, courts et droits comme tout ce qu'ils ne sont pas, ces hommes-là attendent et n'attendent pas vraiment le bus. Je me suis assise à côté de l'homme et de sa veste bien pliée sur ses genoux, son regard disait j'ai l'intelligence sociale d'un enfant de quatre ans mais je sais attendre le bus, les hommes ici, là-bas, les hommes assis au centre de leur vie sont si touchants, parfois.